Réengager ses équipes
De l’innovation à l’évolution du management, comment trouver des pistes pour embarquer vos équipes.
Gestion du changement – culture d’entreprise
La crise de l’engagement dans les entreprises est un signal d’alarme pour les dirigeants et cadres dirigeants. Face à l’individualisme croissant, au désengagement, à l’absentéisme grandissant, la question n’est plus de savoir si, mais comment réagir. L’ère B.A.N.I. (réf notre vidéo) met en lumière la nécessité d’une adaptation rapide des méthodes de management. Ce passage oblige à une réflexion profonde sur les moyens de redonner du sens au rôle de chacun dans les équipes. Une évolution parallèle du management inclusif et participatif, ainsi que de la culture d’entreprise semble également incontournable. L’enjeu reste de répondre à la contrainte d’adaptation rapide à l’accélération des changements économiques, technologiques et socio environnementaux des organisations. L’innovation, bien que vitale, doit être accompagnée d’une transformation des pratiques managériales. Les outils technologiques comme l’intelligence artificielle, la réalité augmentée ou les plateformes collaboratives offrent certes des possibilités nouvelles pour améliorer la productivité et l’engagement. Toutefois, sans une vision claire, une reconnaissance du travail des employés, une autonomie plus développée des équipes et une implication réelle dans les décisions stratégiques, ainsi qu’une vision émanant des plus hauts niveaux, ces outils ne sauraient répondre aux besoins de réengagement ou même atteindre leur plein potentiel.
Le désengagement : un problème global qui demande un changement de point de vue
Le désengagement des employés est aujourd’hui cité comme le défi numéro UN par les dirigeants et cadres dirigeants.
Selon une étude de Gallup, réalisée en 2023, le désengagement des employés est à un niveau record, avec 67% des employés qui ne sont pas engagés dans leur travail. Selon la même étude, 72% des employés en France sont peu engagés, dont 15% totalement désengagés. La France est le pays d’Europe avec le deuxième taux de désengagement le plus élevé, après la Belgique. Une étude de Malakoff Humanis réalisée en 2023, souligne même que 42% des employés français ont l’intention de quitter leur entreprise dans les deux prochaines années.
La complexité de cette problématique réside dans sa nature multifactorielle, touchant à des causes aussi diverses que le manque de reconnaissance, les conditions de travail, l’absence de perspectives d’évolution claires… Ces facteurs contribuent à une baisse de la motivation, un sentiment de non-appartenance, une augmentation de l’absentéisme et du présentéisme (c’est-à-dire être physiquement présent au travail mais mentalement absent). Une difficulté d’adaptation aux changements rapides et constants dans l’environnement de travail ajoute une couche supplémentaire de complexité, exacerbant le sentiment d’insécurité et de frustration parmi les employés.
En France, la productivité par tête, c’est-à-dire la richesse créée par chaque salarié, a connu une baisse significative, inférieure de 6 points par rapport à celle mesurée en 2019. L’absentéisme, qui a augmenté de 45% en 2019 à 62% en 2022, joue un rôle dans cette diminution de la productivité, surtout chez les moins de 35 ans où il a doublé. Cependant, attribuer cette baisse de productivité uniquement à l’absentéisme serait réducteur car d’autres facteurs tels que la crise sanitaire, la baisse du nombre d’heures travaillées et la composition sectorielle de l’économie contribuent également à ce phénomène.
Le problème du désengagement pourrait être partiellement expliqué par le besoin d’appartenance et de reconnaissance, suggérant une insuffisance dans la manière dont les besoins humains sont compris et gérés dans le milieu professionnel, impliquant entre-autre des modèles de management encore pratiqués de nos jours (communication top-down, processus décisionnels centralisés…), qui mettent souvent l’accent sur la conformité, le contrôle et la constance, avec moins de place pour l’autonomie des employés ou pour la créativité. En parallèle les mutations professionnelles et celles de la société suscitent de plus en plus de peurs et d’incertitudes, entraînant du stress et des difficultés en matière de santé mentale. Depuis 2016, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime régulièrement que le coût du stress au travail pour les pays du monde occidental est de l’ordre de 240 milliards de dollars par an. Il ne s’agit donc pas d’un phénomène anecdotique. L’une des explications pourrait résider dans les questions d’appartenance et de reconnaissance, ce qui remet en question la conception quelque peu obsolète dénoncée par plusieurs chercheurs des sciences sociales, qui remettent en question le principe de la pyramide de Maslow, comme une vision idéologique de son inventeur qui aurait sous évaluer d’autres besoins humains et créé une hiérarchie sociale, aussi fausse que peu utile de nos jours, pour faciliter des analyses telles que le désengagement.
L’innovation et l’élément humain en question
Dans le domaine du management collaboratif, l’innovation technologique offre une palette d’outils susceptibles de transformer radicalement la manière dont les équipes interagissent, collaborent et réalisent leurs objectifs. Des plateformes collaboratives aux avancées rapides de l’intelligence artificielle, en passant par les technologies immersives telles que la réalité virtuelle et augmentée, ces technologies promettent d’améliorer la communication, l’efficacité et la créativité des équipes. Elles ne sont pas seulement des facilitateurs de collaboration à distance : elles représentent une opportunité de repenser le management et la gestion des talents.
L’automatisation des tâches répétitives par l’IA, par exemple, libère du temps pour des activités à plus haute valeur ajoutée, donnant plus de temps à la formation continue, au travail collaboratif, à la communication et l’interaction en équipe ou avec les clients, etc. De là peuvent émaner l’innovation et la prise d’initiative. De même, la réalité virtuelle et augmentée ouvre de nouvelles dimensions pour la formation et le développement des compétences, en offrant des expériences d’apprentissage immersives et engageantes.
Cependant, l’adoption de ces innovations soulève la question de leur intégration dans les stratégies organisationnelles existantes. Pour servir de levier au réengagement des équipes, l’innovation ne doit pas être une fin en soi mais doit avant tout s’aligner sur des objectifs d’entreprise, faisant l’adhésion de tous. L’innovation technologique ne peut remplacer l’élément humain. Elle doit davantage être envisagée comme un outil au service d’une vision plus large, centrée sur une culture partagée.
Repenser l’approche du management et la culture de l’incertitude
Face à ces constats, outre l’adoption d’innovations technologiques pour faciliter la collaboration et l’efficacité, l’évolution vers un leadership plus adaptatif et inclusif, qui valorise la reconnaissance, l’autonomie, la confiance et l’équilibre vie professionnelle/vie privée, s’impose de plus en plus. La crise du désengagement en entreprise met en évidence la nécessité d’adopter une approche plus nuancée et complète des environnements de travail et de collaboration.
Traditionnellement, la culture du risque prédomine dans le monde des affaires, où les leaders opèrent avec l’idée de maîtriser les risques en les identifiant pour les prévenir au maximum. Présente depuis la naissance de la modernité (peu ou prou à partir de la Renaissance), cette culture n’est plus adaptée au monde actuel. L’idée du « risque zéro » (ou presque) a fait oublier que l’incertitude existe et existera toujours. Nous tendons ainsi à confondre les deux. Or les leaders sont formés à la gestion du risque mais doivent se débrouiller seuls face à l’incertitude – ce qui en soit s’apprend puisque les entrepreneurs le font. Là où le bât blesse c’est que c’est rarement inscrit dans l’ADN de l’entreprise et dans les préceptes admis par les directions générales ou les actionnaires et investisseurs.
Des concepts du monde, comme V.U.C.A. ou B.A.N.I. tentent de nous rappeler que l’incertitude est une donnée clé, même si sur le fond ils n’inventent rien de nouveau. Le monde et son évolution ont toujours été soumis à l’incertitude, plus ou moins accentuée selon les périodes historiques de nos sociétés et de l’Histoire du monde.
Nous découvrons simplement que nos certitudes, notamment notre capacité à maîtriser le vivant comme l’ensemble des risques, ne sont qu’illusions et engendrent de bien plus grandes incertitudes encore. Illusions collectives que payent en partie les managers aujourd’hui, insuffisamment formés et accompagnés pour développer un leadership fondé sur une culture de l’incertitude – comprenons par-là, sur la capacité à gérer certains risques certes, mais aussi à développer un management fondé sur la flexibilité, la collaboration, l’ouverture au changement, une communication de la transparence, l’expérimentation et l’apprentissage continu face à l’échec. Cela suppose un leadership capable de soutenir les employés dans l’ambiguïté et le changement, surtout lorsque le niveau d’incertitude augmente et s’accélère comme aujourd’hui. Cette approche repose sur la valorisation des compétences individuelles et la promotion de l’autonomie des équipes et des personnes, permettant à celles-ci de s’adapter plus rapidement, notamment par l’innovation et en accélérant leur courbe d’apprentissage et d’expérience.
Pour avancer
Il est certain que le contexte et les défis spécifiques varient d’une entreprise à l’autre, ce qui souligne aussi qu’il n’existe pas de solution unique et universelle pour remobiliser les équipes et les mener vers la réussite. Les leaders sont donc appelés à adapter leur approche en fonction des caractéristiques uniques de leur entreprise et de leurs équipes, en tenant compte des besoins, des aspirations et des motivations spécifiques de chacun. L’enjeu pour les leaders contemporains n’en reste cependant pas moins important, d’autant qu’il est double. D’une part, il est essentiel de rester à la pointe de l’innovation technologique, en intégrant judicieusement les outils les plus pertinents pour soutenir le travail collaboratif et améliorer la communication et l’efficience au sein des équipes. D’autre part, et peut-être plus fondamentalement, il s’agit de cultiver une culture d’entreprise qui valorise la curiosité, l’adaptabilité et l’engagement, des valeurs essentielles pour naviguer dans l’incertitude. Dans cette optique, l’innovation ne doit pas être perçue comme une fin en soi, mais plutôt comme un levier puissant pour réimaginer les modalités du travail en équipe. Elle offre l’opportunité de renforcer les liens interpersonnels, de stimuler la créativité et d’optimiser la performance globale. En s’appuyant et en cultivant une culture qui inclue l’innovation tout en mettant l’accent sur l’humain, les leaders peuvent transformer les défis en opportunités et renforcer l’idée que le succès s’acquière ensemble. L’adaptabilité et la personnalisation des stratégies de gestion des équipes s’avèrent donc être des composantes clés pour le réengagement des individus.
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