Aurons-nous encore besoin de leaders d’ici 2035 ?
Les leaders à l’ère de la disruption technologique
En 2017 déjà le fondateur d’Alibaba se jouait avec humour de l’avenir des leaders en déclarant : « d’ici 30 ans les CEOs seront remplacés par l’Intelligence Artificielle (IA) ». Une étude de Mc Kinsey Global Institute en 2019, n’infirmait pas totalement ce propos, en prédisant que 25% des fonctions d’un CEO seraient prises en charge par des systèmes basés sur l’IA (rapports d’analyse, data décisionnelles…) d’ici une dizaine d’années.
Sans être aussi extrêmes, de nombreux consultants et entrepreneurs préviennent depuis un moment que l’IA et la robotique vont avoir un impact irréversible sur la réduction des métiers et qu’elles modifieront profondément la fonction de leader. Cependant les certitudes restent ancrées dans l’esprit des dirigeants. 72% selon une étude réalisée par PwC Digital IQ Survey en 2020, disaient que l’IA deviendra un complément de la fonction du manager et du cadre dirigeant, en apportant de surcroît un avantage business. 67% des leaders interrogés dans le même contexte, déclaraient que selon eux, l’IA aidera de plus en plus les Hommes et les machines à agir ensemble. Depuis 2021, une autre étude de McKinsey Global Institute (MGI) étudiant l’impact à long terme du Covid-19 sur le travail dans huit pays représentant 62% du PIB mondial, montrait que la crise sanitaire mondiale avait accéléré trois tendances amenées à persister et modifier en profondeur la manière dont nous travaillons : le télétravail, l’e-commerce et l’automatisation /IA adoptées par les entreprises pour faire face aux bouleversements économiques présents et à venir. Tout ceci interroge sur la trajectoire possible des tendances qui se dessinent dans une économie post-covid, où la convergence technologique avait déjà commencé à faire évoluer profondément le marché du travail, modifiant par là-même les rapports au travail et les fonctions d’encadrement.
Les défis des managers et cadres dirigeants
L’IA présente des défis considérables pour ces catégories professionnelles en les amenant à repenser leur rôle sur le moyen et long terme. La collaboration certaine entre Hommes et machines, va amener des besoins de changements profonds en matière de répartition du travail, de formation continue, de recherche de performance et d’éthique. On peut encore fermer les yeux sur les évolutions déjà en cours depuis presque 20 ans mais le fait est que de plus en plus de fonctions sont automatisées. Elles ne sont d’ailleurs pas qu’automatisées : les rapports fournis automatiquement produisent aussi des analyses et des résultats qui invitent à prendre des décisions rapides. Prenons des exemples : toutes les données clients sont aujourd’hui sources de reportings sophistiqués qui permettent aux dirigeants, marketeurs, vendeurs, de prendre des décisions sur la manière de réorienter leurs efforts. Toutes nos conversations ou presque au téléphone sont aujourd’hui enregistrées et décryptées par des systèmes automatiques pour réorienter la communication et les services des entreprises. Plus aucun CV entrant n’est analysé par une RH. C’est un automate qui s’en occupe et qui réalise les tris selon les critères émis par l’entreprise… Tout ceci pose des questions éthiques (exemple la RGPD -politiques vie privée) mais cela ne fait que commencer. S’il est admis aujourd’hui que la fonction de leader ne disparaîtra pas à l’avenir ni même celle de CEO, il est de plus en plus évident que le rôle de chacun va devoir évoluer face à des systèmes qui produisent des données de plus en plus pertinentes et rapides, remplaçant parfois des centaines d’analystes. Les données fournies par l’IA ou l’automatisation peuvent d’ores et déjà produire des rapports sophistiqués mais leur niveau de sophistication dépend toujours des données que l’on souhaite étudier en amont et cela réclame des compétences. De même les leaders auront encore longtemps le rôle de prendre des décisions. L’IA peut émettre des suggestions, pas prendre les décisions à la place des Hommes. Par-contre cela montre deux choses importantes. D’une part il sera important pour les leaders du futur de se former à de nouveaux modes d’analyse et de prise de décision. D’autre part que tout leader doit désormais avancer à marche forcée au rythme des évolutions technologiques pour en bénéficier réellement, c’est-à-dire être capable de comprendre comment positionner son rôle à l’avenir.
Qu’est-ce que l’intelligence artificielle ?
Il s’agit d’un ensemble de techniques et de théories conçues pour développer des applications et des machines capables de simuler l’intelligence humaine. Ces systèmes sont mis en place par des scientifiques, à partir de technologies de pointe. Les applications et les machines sont désormais capables d’interagir et de raisonner avec les humains. Elles peuvent être formées pour réaliser des tâches précises dans l’entreprise. On les utilise aussi de plus en plus pour traiter des milions voire des milliards de données et fournir une aide à la décision. L’intelligence artificielle progresse en performances de manière exponentielle. Selon une étude menée par Deloitte en 2021, concernant 10 000 chefs d’entreprise et responsables RH, 41 % des organisations ont déjàadopté les outils d’IA.
« La triste réalité est que le management intermédiaire est en passe de disparaître progressivement. Il y aura certes toujours des personnes pour en superviser d’autres dans les organisations mais les évolutions du travail, l’accroissement du rôle des technologies intelligentes, les changements de culture et les évolutions démographiques, vont toutes conspirer à faire évoluer les pratiques managériales rapidement dans les entreprises, les prochaines années. Les fonctions d’encadrement intermédiaires auront de moins en moins d’impact dans le fait de connecter les équipes ou d’assurer l’alignement des objectifs entre les différentes voies hiérarchiques »
Sidney Finkelstein, professeur de stratégie et de leadership de la Tuck School of Business de Dartmouth.
Quel rôle pour les leaders à l’avenir ?
L’IA assurera donc sans surprise de plus en plus de fonctions techniques et décisionnelles du management et remplacera nombre de postes de management intermédiaire mais elle ne pourra pas remplacer le côté humain du leader. Celui-ci devra à la fois évoluer dans ses interactions humaines, ses capacités de stratégiste mais aussi renforcer ses compétences entrepreneuriales et sa créativité. Les meilleurs leaders aujourd’hui sont ceux qui ont à la fois des capacités créatives, humaines, stratégiques et décisionnelles mais cela deviendra de plus en plus un standard pour évoluer dans ces fonctions. L’IA ne sera pas capable avant longtemps, s’il en est un jour, de faire coïncider les émotions et les aspects humains relevant du leadership influent et motivant. Réalistiquement, personne n’obéira à l’avenir à un robot ! Alors quel sera le rôle d’un leader à l’avenir ? Un rapport du MIT, publié dans la revue Sloan, prédisait déjà en 2018 que : « les relations au travail basées sur une conception de la communication parent-enfant de la part des leaders sera dorénavant obsolète. Quand la technologie permet d’avoir des niveaux d’information et d’analyse sophistiqués, cela oblige les leaders à se focaliser sur les aspects humains et l’engagement des équipes et non sur des rapports descendants. On a vu d’ailleurs l’effet boomerang que le manque de sens au travail et de désengagement massif a créé avec le phénomène : Leadership Exodus. Les leaders devront apprendre de plus en plus vite à diversifier leurs équipes pour inclure des collaborateurs à la fois expérimentés et créatifs. L’enjeu sera de trouver un équilibre entre vision et réalisation des objectifs courts termes mais aussi, comment exercer un meilleur jugement à partir des données fournies par l’IA. Il reviendra aussi aux leaders assez naturellement de savoir créer l’engagement de leurs équipes, c’est-à-dire de leur conférer de la valeur dans leurs fonctions par rapport à ce que les technologies pourront créer par ailleurs. Dans un sens, ce rôle débordera la sphère de l’entreprise, puisque nombre de personnes cherchent à se réaliser professionnellement et de manière existentielle à travers leur métier. Or plus le niveau d’IA va augmenter plus le niveau de désengagement aussi risque être fort et fréquent, conduisant à des phénomènes comme le brow-out ou le burn-out. Talent solutions a révélé dans une enquête réalisée en 2018, que 42 % des personnes qui changent d’emploi ont déclaré qu’elles auraient pu rester auprès de leur employeur si elles avaient eu plus d’opportunités, d’avantages ou de signes reconnaissance. Ce n’est qu’un effet annonciateur d’un mouvement plus large qui s’annonce. A quand la création d’un nouveau département dans les entreprises que l’on pourrait baptiser : Département des Humanités ? Il aurait pour rôle d’aider les leaders à se développer sur un plan personnel, à développer leurs capacités à se projeter, à communiquer (y compris dans la création de bon contenu pour la marque employeur), à mieux réseauter et aider en retour leurs équipes à trouver un niveau d’engagement suffisant face à tous les changements qui les attendent.
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