Comment les grands fondateurs réussissent-ils à imposer leur vision ?
Développer sa vision stratégique
Nous attendons des dirigeants qu’ils aient avant tout une vision. Si vous avez déjà eu l’impression que votre vision était difficile à saisir, vous n’êtes pas le ou la seul-e. Elle peut même être fluctuante, mouvante et c’est ce qui en fait toute la difficulté. Elle tient beaucoup aussi à la façon dont vous emporterez l’adhésion des différents acteurs. A ce propos, les entrepreneurs de génie ont une manière, de faire en sorte que leur vision soit incontournable. Parcourons comment ils s’y prennent.
Sentir les moments décisifs
C’est le premier trait de génie des grands fondateurs : ils repèrent les signaux faibles et les tendances émergentes et ils les extrapoler sur cinq ans (ni à trop long terme ni à trop court terme). Lorsqu’ils décrivent leur vision, ils se basent sur des éléments très logiques : il n’y a aucune pensée magique derrière leur résonnement même s’il semble parfois très prospectif. Il n’est pas nécessaire d’être un visionnaire pour avoir une vision. Il suffit de relier les tendances technologiques et économiques actuelles aux besoins futurs des clients. Cela procède d’une observation grand angle, qui réduit les facteurs discriminants mais aussi, cela repose en définitif sur un esprit pragmatique. Ces fondateurs espèrent intimement que cela modifie durablement les usages, parce que c’est dans leur ADN de créateur mais en vérité, ils n’ont aucune idée précise de l’ampleur des changements que leurs innovations vont apporter, notamment sur le très long terme. La question que va donc se poser un fondateur de génie c’est : pourquoi est-ce le bon moment ? Pourquoi maintenant ? La nature a horreur du vide. Alors pourquoi leur solution n’a-t-elle pas été conçue avant ? Est-ce parce qu’il manquait un progrès technique ou technologique ? Est-ce parce que la demande ne pouvait émergée en raison de restrictions juridiques ou morales (reproduire des Bibles en série au début de l’imprimerie, n’était pas du tout du goût de l’Eglise, même si elle trouvait un avantage pour diminuer les erreurs humaines des copistes ou les interprétations hasardeuses) ? etc. Le pourquoi est la clé de voûte pour sentir le moment choisi. La meilleure réponse ne repose pas sur une tendance ou une projection à 10 ans, mais plus souvent sur une combinaison de possibilités technologiques, de nouveaux savoir-faire, d’évolutions réglementaires et concurrentielles, qui vont représenter une mutation des usages. L’internet, l’iphone, Uber, les fusées qui reviennent sur Terre, la voiture électrique produite à grande échelle (les voitures électriques existent bien avant notre ère écologique …), en sont de bons exemples. Toutes ces innovations ne sont pas nées à notre époque : elles étaient déjà apparues avant. C’est la combinaison de facteurs qui les a rendus possibles et le fait que des dirigeants ont évalué correctement le momentum.
Communiquer sur sa vision, de manière convaincante
Une vision et son porteur, doivent donner une image claire de là où une entreprise, un programme ou un projet pourrait aboutir, et ce d’une manière inspirante, entrainante, rassurante et donnant envie de prendre des risques, notamment en termes d’investissements. Le canevas pour bâtir une telle vision est toujours basé sur les mêmes règles : 1) notre vision est que nous pourrons réaliser [telle activité] de manière plus facile ou plus rapide que [faire une comparaison utile]. 2) Cela n’a pas été possible auparavant, parce que les [trois tendances pertinentes] n’étaient pas réunies jusqu’ici. Ces tendances s’accélèrent aujourd’hui maintenant que les conditions [technologiques, réglementaires ou concurrentiels décisifs] sont levées (ou en train d’être levées). 3) C’est le moment de faire un exercice d’imagination, en se demandant s’il était possible d’[atteindre un ou plusieurs résultats inspirants] avec seulement [un accès unique pour l’utilisateur (ou une autre condition technologique)]. Nous serons réellement en mesure d’offrir cela dès que nous aurons [décrier les domaines critiques à surmonter pour l’entreprise]. 4) Une fois que cela sera possible, notre marché s’ouvrira naturellement des [typologies actuelles de clients] à toutes les [typologies de clients potentiels]. 5) Avec le renforcement des usages, nous pourrons éliminer progressivement, toutes les formes de [injustices du statu quo]. Et nous cherchons à développer cette vision dont nous pensons qu’elle fera progresser [telle situation de société].
Voici quelques questions pour vous aider à remplir les [cases] :
- Quelle activité vos clients pratiquent-ils lorsqu’ils utilisent votre produit ou service ?
- Quelle est la meilleure métaphore ou comparaison pour faire passer votre idée en aussi peu de mots que possibles ?
- Quelles sont les tendances actuelles : macroéconomiques, technologiques ou de consommation, qui justifient votre vision ?
- Qu’est-ce qui a récemment changé dans votre environnement technologique, réglementaire ou concurrentiel et qui rendait jusqu’ici votre vision impossible ?
- Qu’est-ce que les clients réaliseront à l’avenir qui est quasi impossible à réaliser aujourd’hui ?
- Quelle est l’action minimale que les clients peuvent entreprendre pour atteindre ce résultat à l’avenir ?
- Quels sont les clients sur lesquels vous vous concentrez aujourd’hui ? Et ceux que vous cherchez à conquérir ? Quelles sont leurs insatisfactions, leurs besoins oubliés ou non comblés, leurs rêves cachés ?
- Qu’est-ce qui ne va pas dans les usages actuels et auxquels vous pouvez mettre un terme ?
- Comment pouvez-vous évoquer les évolutions que vous devez apporter à votre entreprise, sans trop entrer dans les détails, au risque de faire peur ?
La vision doit créer la conversation
La vision est une manière déjà aboutie de poser un scénario d’évolution pour l’entreprise, qui permet d’une part de mettre des mots précis sur un projet – donc de donner une chance de concrétiser quelque chose – mais aussi de mettre en conversation les acteurs pour que les changements se fassent progressivement. Aucune vision ne naît spontanément et aucune vision ne se réalise sans effort en matière de gestion de changement, de communication et d’ajustements successifs. Simplement l’innovation ne peut être l’innovation si elle n’est jamais nommée comme telle, si elle n’est pas partagée par un nombre important d’acteurs qui vont la vivre et la rendre crédibles et si elle n’est pas l’objet de débats (voir notre article sur la prospective).
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